En quoi la situation de votre bien en zone à risque élevé du PPRN pourrait avoir une incidence sur la valeur vénale ?
En France, les deux tiers des 36 000 communes sont exposées à au moins un risque naturel.
Le principal risque sur notre territoire, en métropole, est celui d’inondation. Il s’agit d’un risque capital en raison du nombre de communes concernées mais également au titre du coût économique qu’elles peuvent engendrer.
Plus que jamais, le recul généralisé des côtes basses ou encore la sécheresse géotechnique soulèvent de nouvelles problématiques en termes de risques.
Le dérèglement climatique ne fait qu’accroitre ces phénomènes naturels qui s’établiront chaque année à 560 catastrophes à l’échelle mondiale (soit 1,5 /jour en moyenne) selon l’UNDRR1, comme représenté sur le graphique ci-après.

Des plans nationaux définissent le cadre d’action, l’orientation et la coordination des politiques de prévention des risques naturels afin de réduire la vulnérabilité des personnes et des biens.
Ces Plans de Prévention des Risques Naturels (PPRN) précisent les zones réglementées et les prescriptions associées à l’échelle territoriale.
En quelques chiffres, ils représentent 10 226 plans concernant le risque d’inondation hors submersion marine, 2 001 plans concernant le risque de retrait-gonflement des argiles, 442 plans concernant le risque d’inondation par submersion marine ou encore 206 plans concernant le risque d’incendie de forêt.
Bien que leur objectif soit relatif à la sécurité publique, leur mise en place ou encore leur révision soulèvent souvent de nombreux questionnements pour les propriétaires concernés. Ces derniers s’inquiètent notamment de voir la valeur vénale de leur bien baisser et ce, particulièrement s’il est classé en zone à risque élevé.
C’est le constat que nous faisons en tant qu’experts tout comme de nombreux collaborateurs de la Direction Départementale des Territoires (DDT), chargés de l’élaboration des différents PPRN.
Qu’est-ce que le PPRN ?
Le PPRN a été institué par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement, dite loi Barnier.
Il s’agit d’un document d’urbanisme permettant d'identifier les risques prévisibles qui constituent une menace pour la population ainsi que les biens, de délimiter les zones exposées directement ou indirectement à ces risques, d'y réglementer l'utilisation des sols et de déterminer les mesures de construction applicables.
Selon l’Article L562-4 du Code l’environnement, le PPRN approuvé vaut servitude d’utilité publique. Cette dernière constitue une limitation administrative au droit de propriété, elle est instituée par l’autorité publique dans un but d’utilité publique. Plus concrètement, elle peut aboutir à des interdictions ou limitations du droit d’occuper et d’utiliser le sol mais également à l’obligation d’effectuer certains travaux.
Les dispositions réglementaires du PPRN prévalent toujours sur l’ensemble des autres documents d’urbanisme. Par exemple, si un terrain apparaît constructible au regard du PLU mais qu’il est classé en zone rouge (inconstructible) du PPRN, c’est son zonage mentionné dans ce dernier qui prime.

Exemple d’un extrait de carte réglementaire (Chamonix Mont-Blanc)
Zone rouge du PPRN synonyme de décote de la valeur vénale ?
La servitude d’utilité publique (SUP)
La servitude d’utilité publique relative au plan de prévention des risques naturels peut recommander ou rendre obligatoire (dans la limite de 10 % de la valeur vénale) la réalisation de certains travaux voire interdire l’édification de nouvelles constructions.
Les dispositions réglementaires véhiculées par un plan de prévention des risques naturels peuvent ainsi être plus ou moins contraignantes pour le propriétaire du terrain.
Notons que les prescriptions les plus contraignantes sont l’impossibilité de reconstruire un bâtiment sinistré ou encore l’inconstructibilité pure et simple d’un terrain.
La décote admise systématiquement est celle concernant un terrain originellement constructible (PLU) qui se verrait requalifier en zone inconstructible (PPRN). Dans ce cas, la décote correspond à la différence entre la valeur du terrain constructible et celle du terrain en zone agricole ou de jardin d’agrément.
Le fonds Barnier et la garantie Cat-Nat
Le fonds Barnier, également appelé Fonds de Prévention des Risques Naturels Majeurs (FPRNM), a été créé en 1985 via la loi Barnier.
Il permet de financer les mesures de prévention ou de protection des personnes et des biens exposés aux risques naturels majeurs. Une enveloppe budgétaire annuelle de 200 millions d’euros lui est consacrée.
Pour un bien à usage d’habitation, le fonds Barnier peut ainsi financer à hauteur de 80 % les travaux imposés par un PPRN et ce, dans la limite de 36 000 euros.
De plus, la garantie Cat-Nat permet d’indemniser les dégâts causés par les catastrophes naturelles (tremblement de terre, inondations, glissement de terrain, sécheresse, etc.). Selon l’Article L124-1 du Code des Assurances, elle prend en charge les « dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises ».
Cette extension de garantie est obligatoire pour l’ensemble des contrats d’assurance de dommages, à l’exclusion des contrats d’assurance des bateaux. Par exemple, l’assurance multirisque habitation comporte systématique la garantie Cat-Nat.
Elle peut être déclenchée uniquement si un arrêté interministériel de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle est publié.
Le montant de la prime, 12 % de la prime d’assurance multirisques, et celui de la franchise, 380 euros pour les biens à usage d’habitation, sont fixés par le gouvernement.
En France, ces deux « filets de sécurité », que sont le fonds Barnier et la garantie Cat-Nat, réduisent ainsi considérablement la potentielle dépréciation d’un bien exposé en zone à risque.
Focus Caroline du Nord (Etats-Unis) : En 2008, une étude a été réalisée en Caroline du Nord afin d’analyser les conséquences de l’instauration d’un formulaire informatif recensant les risques naturels potentiels sur un bien.
Cette étude fait ressortir une décote moyenne de 4 % sur le prix des logements situés dans les zones fédérales de risque inondation (probabilité de crue supérieure à 1 %/ an) et ce, par rapport à des logements non exposés ou exposés à des risques moins fréquents.
Aux Etats-Unis les primes d’assurance catastrophes naturelles sont fixées en fonction de l’exposition aux risques du logement, contrairement à la France. La décote de prix de 4 % traduit donc, au-delà de la présence du risque recensé dans le formulaire informatif, une anticipation des futures primes d’assurance.
Le risque
Le risque est considéré comme une mesure de la situation dangereuse qui résulte de la confrontation d’un aléa2 et d’enjeux vulnérables.
A l’évidence, plus le degré du risque et sa récurrence sont élevés, plus il sera susceptible d’être capitalisé dans la détermination de la valeur vénale. Dès lors, la situation en zone à risque faible n’engendrera aucun impact sur la valeur vénale.
A l’inverse, plusieurs études estiment qu’une baisse de la valeur vénale peut être particulièrement observée si le risque se produit de façon récurrente, s’il est particulièrement intense et qu’il engendre des dégâts visibles ou encore s’il a été très médiatisé.
Par exemple, selon la caisse centrale de réassurance, après le passage de la tempête Xynthia, les pertes de valeur vénale aurait été observées uniquement sur une période de 18 à 24 mois avant de retrouver un niveau normal.
Il existe ainsi une notion de temporalité dans la dépréciation de la valeur vénale qui s’estompe au cours du temps. Cette dernière est liée à la mémoire du risque.
Le secteur
L’existence d’une aménité environnementale3 sur un secteur rend plus complexe la détermination du potentiel impact du PPRN sur la valeur vénale.
L’aménité peut, par exemple, être une situation ski-in / ski-out, une vue sur le massif du Mont-Blanc, une situation sur le littoral avec accès direct à la mer, etc.
Ces aménités sont souvent corrélées à des risques (ex : accès skis aux pieds et risque d’avalanche).
La présence d’une aménité est souvent un élément recherché par les acquéreurs et valorisant pour le bien. A l’inverse, il semblerait que l’existence du risque soit moins considérée.
La capitalisation d’un risque indiqué dans le PPRN peut disparaître s’il existe des aménités et ce, d’autant plus si le bien se situe en zone tendue.
Ce phénomène de compensation est notamment illustré à travers une étude réalisée dans les Hauts-de-France, où toutes choses égales par ailleurs, la surcote de prix des appartements situés sur le littoral et en zone à risque fort voire très fort possèdent en moyenne une valeur vénale augmentée de 25 %. Enfin, la présence d’un PPRN peut réduire la densification de certains secteurs pouvant parfois conférer un certain sentiment d’intimité. Cela peut ainsi renforcer le caractère recherché de certains biens et ce, davantage s’il s’agit de bien haut de gamme ou de luxe.

Bien que les dispositions réglementaires puissent nécessairement engendrer des contraintes, le plan de prévention des risques naturels ne fait que traduire la présence d’un risque existant et permet de protéger la population et les biens.
La détermination de la valeur vénale d’un bien en zone à risque élevé est une mission complexe qui s’étudie au cas par cas et notamment selon : le secteur, les caractéristiques particulières du bien, la nature du risque, etc.
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- Le Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophes (UNDRR) œuvre en vue de réduire de manière significative les pertes causées par les catastrophes. ↩︎
- L’aléa correspond à la manifestation d'un phénomène naturel ou anthropique plus ou moins probable sur un espace donné. ↩︎
- Les aménités sont les éléments naturels de l’espace représentant un attrait pour les habitants, permanents ou temporaires. Le terme d’aménité recouvre les éléments, du paysage ou du milieu, perçus comme « naturels » et exerçant une attractivité touristique ou résidentielle, mais le sens peut être étendu aux aménagements destinés à faciliter l’accès à ces éléments (source : geoconfluences.ens-lyon.fr). ↩︎